Jean-Marie Barillère : "Une démarche d'AOC, c'est une démarche collective dans une direction donnée"
Premières indications sur les marchés du champagne en 2017, grande distribution et création de valeur ont été les éléments clés du propos de Jean-Marie Barillère, coprésident du Comité Champagne en tant que président de l'Union des maisons de champagne.
Jean-Marie Barillère, AVC 2017
"Où en sommes-nous en 2017, en termes de création de valeur, par la filière Champagne ? Sans aucun doute, encore une année record, où nous allons frôler ou peut-être même dépasser les 5 milliards d'euros de chiffre d'affaires. Nous, interprofession, nous n'y sommes pas pour grand-chose, nous ne vendons rien. En revanche nous essayons tout simplement d'élaborer un cadre dans lequel vous, créateurs de valeur, vous avez suffisamment confiance pour réaliser dès aujourd'hui les investissements d'avenir."
Jean-Marie Barillère a évoqué les différents marchés, espérant que "2017 sera peut-être l'année où le marché français aura cessé de reculer, en volume et en valeur. Il est un indicateur pour tous les autres marchés, en se référant notamment au positionnement prix dans la grande distribution". Un secteur que n'a pas manqué d'épingler le président de l'UMC : "Des amis, soi-disant, qui nous posent de sérieux problèmes. Notre appellation Champagne, les Marques de maisons servent trop souvent de produits d'appel et sont tour à tour prises en otage par des techniques permises par la loi. Ça suffit. Nous comptons sur la capacité de ce gouvernement pour légiférer et limiter les seuils de revente à perte, interdire le cagnottage, et le détournement de notoriété. Notre travail collectif de création de valeur autour de l'appellation est trop souvent anéanti par le dernier maillon de la chaîne alimentaire, alors même que notre appellation devrait être protégée par l'Etat. Arrêtons ce massacre."
Jean-Marie Barillère a ensuite balayé différents marchés à l'export qui se portent bien (USA, Royaume-Uni, Japon). "En résumé, des indicateurs de marché au vert, gages de notre réussite, qui récompensent le travail passé. A nous de relever les défis d'aujourd'hui afin de continuer cette belle aventure de la Champagne et d'investir dans la création de valeur de demain. Pour y parvenir, il nous faut coller aux attentes de nos clients et consommateurs et même les anticiper."
"Nous avons créé le label Viticulture durable en Champagne afin de porter plus haut les couleurs des vins de Champagne. Ne manquons pas cette opportunité."
"Comment ? Avec l'excellence de nos vins ? Bien sûr, mais ce n'est plus suffisant : l'excellence de nos vins en minimisant notre empreinte environnementale. Qu'attendons-nous pour supprimer l'emploi des herbicides dans notre beau vignoble de Champagne ? Vous savez encore mieux que moi qu'une telle évolution ne se fait pas en un jour, que le passage de la non-culture à une maîtrise mécanique de l'herbe demande de l'expérience, une courbe d'apprentissage, d'observation de son vignoble, car les années se suivent et ne se ressemblent pas. Cela demandera de la présence dans les vignes, des prises de décision en fonction du risque encouru, un vrai travail d'expert, d'artiste même. Cela a un coût et ce sont des contraintes supplémentaires. Ce sont aussi des opportunités de revenus supplémentaires, dans la mesure où nous aurons été capables de transformer ces savoir-faire nouveaux en une amélioration de l'image de notre appellation et de nos vins.C'est l'enrichissement de cette image qui nous permet d'augmenter nos prix de vente. C'est possible, j'en veux pour preuve ce que les bio ont été capables de faire. Alors pourquoi pas les vignerons certifiés Viticulture durable en Champagne ? Nous avons créé ce label afin de porter plus haut les couleurs des vins de Champagne. Ne manquons pas cette opportunité."
"Une démarche d'AOC, c'est une démarche collective dans une direction donnée. Nous avons pris celle de l'excellence en Champagne. Donnons-nous les moyens de nos ambitions et ne tolérons plus en 2018 les comportements aberrants, destructeurs de valeur pour la collectivité. J'ai bon espoir que nous puissions aboutir à des propositions d'amélioration, comme, par exemple, la mesure obligatoire de l'acide gluconique sur toutes les caisses, ou de tout autre indicateur de l'état sanitaire des raisins. J'espère que nous aurons le courage de les mettre en place. C'est mon vœu le plus cher et je sais que c'est aussi celui de Maxime Toubart. Nous ne pouvons pas avoir une démarche de progrès sans une ambition collective renouvelée, enrichie : une appellation, ce n'est pas le plus petit dénominateur commun, cela doit être le consensus autour des pratiques de ceux qui vont de l'avant."
Le coprésident du Comité Champagne a ensuite parlé de communication : "La communication intelligente de chacun, qui représente une puissance de feu considérable, peut-être accompagnée d'une communication collective. Je l'ai déjà dit à cette tribune : les Maisons ne sont pas opposées à une communication collective qui n'aurait pas pour but de vendre plus, mais d'enrichir l'image de l'appellation par notre terroir, notre territoire et notre savoir-faire. Avec d'autres mesures, y compris des mesures d'améliorations qualitatives, cela peut faire partie d'un plan de progrès qui nous fera avancer collectivement dans cette quête permanente de l'excellence."