À cette occasion, la CNAOC a interrogé les eurodéputés membres de l’Intergroupe Vin, Spiritueux et Produits de qualité du Parlement européen, le Français Éric Sargiacomo (S&D), l’Allemande Christine Schneider (Renew), la Hongroise Enikő Győri, (Les Patriotes) et l’Espagnole Esther Herranz García (PPE), sur leur vision de la place du vin dans notre société.
Pourquoi soutenez-vous la campagne VitaEVino ?
Éric Sargiacomo : En tant que coprésident de l’Intergroupe Vin, Spiritueux et Produits de qualité au Parlement européen, il me semble indispensable de faire la promotion de la culture du vin, de la convivialité et de la consommation responsable. Je me retrouve ainsi pleinement dans la campagne Vitævino. Venant du Sud-Ouest et plus particulièrement, à la frontière avec le Gers, c’est pour moi évident de rappeler que la viticulture fait partie de notre histoire et de nos paysages, nos savoir-faire sont mondialement reconnus pour leur excellence, celle d’une alchimie entre un terroir, un cépage et nos palais.
Christine Schneider : Je soutiens la campagne Vitævino, car pour moi, une consommation modérée de vin fait partie d’un mode de vie saine.
Enikő Győri : L’Europe est le berceau des vins de qualité. Cependant, le secteur vitivinicole a subi des attaques sans précédent ces dernières années : non seulement à cause du changement climatique, mais aussi en raison des campagnes du lobby antialcoolique visant à diaboliser la consommation d’alcool, même celle qui est modérée. Les conséquences sont terribles. Je soutiens pleinement l’initiative Vitævino, car elle vise à sensibiliser au rôle que joue le vin dans nos vies.
Esther Herranz García : Je suis née et j’ai grandi à La Rioja toute ma vie, et je comprends donc parfaitement l’importance du vin pour de nombreuses régions et la façon dont leur culture y est étroitement liée. Le vin n’est pas seulement une boisson : il représente le patrimoine, la tradition, la culture, la croissance économique et les liens sociaux. Certains essaient de le réduire à un simple alcool, mais c’est bien plus que cela.
Avez-vous un exemple concret d’un projet de loi ou d’une règlementation qui vous aurait marqué et pourquoi ?
É. S. : La prohibition, ça ne marche pas, il faut lui préférer l’éducation et la sensibilisation à un territoire et ses vignerons. Plutôt qu’un janvier sec, je préfère promouvoir la consommation responsable toute l’année. Beaucoup aiment ajouter les solutions simplistes, ce n’est pas mon cas. Penser qu’on va régler le problème de surconsommation et de dépendance d’une frange de la population en instaurant une taxe sur le degré d’alcool, ce n’est pas sérieux. En résumé, je préfère la tempérance à l’abstinence !
C. S. : Les lois de ces dernières années, notamment en ce qui concerne le Green deal, poursuivent sans aucun doute les bons objectifs. Cependant, leur mise en œuvre a adopté une approche totalement erronée. Le renforcement de la documentation et des interdictions ne permettra pas de sauver le climat ni de protéger la biodiversité. Les mesures bureaucratiques introduites dans le cadre du règlement européen sur la déforestation en sont un exemple particulièrement alarmant.
E. G. : La première Commission dirigée par la présidente Von Der Leyen a pris de nombreuses décisions dangereuses sous l’influence d’idéologies qui ont nui aux agriculteurs. Aujourd’hui, la nouvelle Commission promet de simplifier et de supprimer de nombreuses normes qu’elle a orchestrées. Je crains que la réduction de 25 % et 35 % des formalités administratives promise par la Commission ne fasse qu’alléger les fardeaux qu’elle a fait peser sur les épaules des entreprises au cours du dernier mandat.
E. H. G. : L’idée de restreindre l’accès aux campagnes de promotion du vin semble peu judicieuse, surtout si l’on considère la valeur de nos exportations et la réputation dont jouissent nos vins dans le monde entier. Les vins à Indications géographiques (IG) sont respectés parce qu’il s’agit de produits de haute qualité, profondément enracinés dans les traditions et l’histoire régionale. Ils servent également de point d’entrée vers d’autres produits IG, renforçant ainsi notre patrimoine gastronomique.
Que peut-on faire pour promouvoir la consommation modérée de vin ?
É. S. : À nouveau, il ne faut pas se tromper de bataille : nous devons continuer à sensibiliser les populations à risques, sans tomber dans le côté excessif de la prohibition. La consommation de vins en France a baissé de plus de 60 % depuis les années 1950, certains semblent oublier les efforts déjà consentis, et je ne suis pas certain que le vin soit l’alcool le plus problématique s’agissant des principales conduites à risques. Les nouvelles règles sur l’étiquetage des vins doivent rester telles qu’elles sont. Si la Commission européenne souhaite aller plus loin, je ne vois aucune difficulté à ce que le pictogramme avec la femme enceinte soit généralisé.
C. S. : Nous devons nous concentrer davantage sur l’éducation plutôt que de risquer l’acceptation par le biais d’interdictions. Les faits scientifiques doivent être défendus en politique et nous devons plaider en faveur de leur mise en œuvre fondée sur la connaissance.
E. G. : L’intergroupe Vin du Parlement européen peut jouer un rôle important. En tant que vice-présidente, je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour promouvoir les vins européens, y compris ceux qui sont élaborés en Europe centrale, d’où je viens.
E. H. G. : Il faut développer l’éducation. L’essentiel est de fournir des informations claires et factuelles sur les risques d’une consommation excessive, tout en promouvant une approche responsable et culturelle du vin.
Propos recueilli par la CNAOC