À l’heure où j’écris ces lignes, je reçois beaucoup d’informations sur les attaques de gel dans les vignobles de nos confrères du Jura, du sud de la France ou encore du Val de Loire. Le même scénario se répète trop souvent : un hiver clément, un débourrement plus ou moins précoce et une vague de froid dévastatrice en avril.
En Champagne, les dégâts semblent assez limités, tant mieux.
Mais nous constatons d’année en année les effets délétères du dérèglement climatique avec des craintes de plus en plus fortes sur la sécurité de nos raisins, des premiers bourgeons jusqu’à la vendange.
C’est pour cette raison que nous avons, au sein de l’interprofession, augmenté la réserve individuelle de 2 000 kg, ce qui nous permet de pallier le pire et de renforcer notre résilience.
J’adresse un salut confraternel et solidaire à tous ceux qui ont été touchés par ces gelées.
Tout ne se décide par au sein de l’interprofession. Le 9 juin prochain se tiendront les élections européennes. C’est un scrutin qui aura de lourdes conséquences pour notre Appellation et nos métiers.
Nous avons longuement abordé le sujet lors de notre belle assemblée générale : de plus en plus de décisions concernant le secteur vitivinicole se prennent à Bruxelles.
Même si le débat médiatique sur ces élections est une fois de plus très politicien franco-français, je me permets de vous rappeler que les eurodéputés que nous élirons quitteront leur famille politique française pour rejoindre les sept groupes du Parlement européen qui ont des idées bien arrêtées sur nos métiers et notre production.
C’est pour cela que le Comité Champagne renforce sa présence à Bruxelles et c’est aussi le sens de mon entrée au sein de la Fédération européenne des vins d’origine Efow comme vice-président.
Les enjeux européens pour notre viticulture sont majeurs.
Cela commence par la nécessité de garder la main sur la régulation de notre production. Nous avons obtenu le maintien des droits de plantation au moins jusqu’en 2045. Le combat continue, et nous défendrons nos positions lors du point d’étape avec la Commission européenne en 2028. Nous ne transigerons pas sur ce point fondamental.
Par ailleurs, l’Union européenne nous impose d’autoriser dans notre AOC, la plantation de 10 ares par an de vignes pour des vins sans Indication géographique et sans cahier des charges strict. Nous sommes mobilisés pour ne pas devenir un vignoble mixte.
Nous redoutons également de voir revenir sur le devant de la scène européenne des règlements exagérément contraignants et déconnectés de la réalité du terrain sur l’usage des produits phytosanitaires, avec en plus un risque de surtransposition dans notre pays.
Je vous rappelle que la Commission européenne avait décrété notre secteur viticole comme non essentiel à la souveraineté alimentaire et se moquait du risque de perte de près de 28 % de la production française en cas d’application du règlement SUR. Il a été retoqué, mais pour autant nous devons rester vigilants et proactifs.
La manière dont la prochaine mandature appréhendera la consommation de vin sera aussi déterminante pour notre avenir. Des lobbies hygiénistes puissants veulent nous assimiler au tabac avec toutes les conséquences que cela implique : nouvelles mentions sanitaires sur l’étiquette, fiscalité accrue, fin des subventions… Il faudra monter au créneau pour défendre nos produits et notre modèle de société responsable.
Nous, nous revendiquons une consommation modérée qui laisse la place au plaisir, au goût, aux arts de la table, à la convivialité, au partage, à l’hédonisme.
Le 9 juin, vous savez ce que vous devez faire !