Vin et santé, ce qu’en dit la science

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Il suffit de taper les mots-clés “alcool, vin, santé, médecine” sur un moteur de recherche pour voir fleurir à l’écran moult études contradictoires décrivant les effets du vin sur la santé. Une occurrence chassant l’autre, un jour une consommation modérée aurait un bénéfice non nul pour la prévention des maladies cardio-vasculaires, du diabète ou de certains cancers ; un autre, la dive bouteille serait un viatique menant droit au cimetière. Quelles sont les pistes scientifiques sérieuses pour nous éclairer ?

La difficulté majeure rencontrée par les scientifiques pour mener une étude incontestable qui évaluerait les effets du vin sur la santé tient au protocole expérimental. Il faudrait pour bien faire isoler du reste du monde des groupes d’humains représentatifs et leur prescrire des doses différentes d’alcool pendant des décennies. Peu de chance d’avoir le feu vert d’un comité d’éthique !
Par ailleurs le bénéfice santé engage des causalités multiples : l’hérédité, la qualité de l’alimentation, la mobilité, l’absence de tabagisme… Pour exemple, on sait statistiquement que les consommateurs de bons vins ont en moyenne une meilleure hygiène de vie, mais réduire leur bonne santé au seul mérite de leur consommation modérée de bonnes cuvées serait évidemment malhonnête.
Pour autant, la recherche scientifique emploie des méthodologies signifiantes pour déterminer les interactions entre certaines molécules présentes dans le vin et l’organisme humain. Si aucune étude sérieuse ne lui attribue à lui seul un rôle protecteur, il semble se dégager un consensus pour reconnaître que le vin présente des associations positives dans la prévention des pathologies cardio-vasculaires ou des maladies neurodégénératives.
Vin et Société, la structure de promotion et de défense du monde viti-vinicole, réalise depuis 2007 avec l’appui du cabinet Alcimed une analyse bibliographique incrémentale qui étudie l’effet d’une consommation modérée de vin sur la santé. Cette analyse porte sur 603 études publiées entre 2007 et 2016 sur PubMed, le principal moteur de recherche de publications scientifiques, dont aucune n’a été financée par la filière viticole.
Face au manque de standardisation de l’ensemble des publications retenues (différences de méthodologies, de taille d’échantillon, de type d’études…) une classification en quatre niveaux de preuve a été effectuée afin de faciliter la lecture des résultats :
Consensus lorsque 8 études ou plus montrent une tendance claire ;
Piste sérieuse pour  4 à 7 études ;
Piste émergente pour 2 à 4 études ;
Controverse lorsque plusieurs études montrent des tendances contradictoires.
L’analyse qui porte sur des pathologies majeures pointe un consensus indiquant que la consommation modérée de vin aurait un effet bénéfique dans la prévention des maladies cardio-vasculaires, du diabète de type 2 et du syndrome métabolique. Cependant des pistes émergentes semblent indiquer que cette consommation modérée de vin aurait un effet relativement neutre sur l’obésité, voire néfaste pour les problématiques d’adiposité abdominale.
Pour les cancers, un consensus existe sur les bénéfices d’une consommation modérée de vin sur la survenue du cancer colorectal et du cancer de l’œsophage. En outre, elle n’aurait pas d’effet particulier sur le développement de cancers de l’ovaire, de l’utérus et de l’endomètre ainsi que sur les cancers du pancréas et de l’estomac. Des pistes sérieuses font émerger un effet bénéfique dans la prévention du cancer du rein et un effet relativement neutre sur celle des lymphomes. Quelques études orientent vers une piste émergente d’un impact neutre sur les cancers du foie et du cerveau. Enfin, des controverses existent sur les cancers des voies aérodigestives supérieures excepté l’œsophage (l’effet serait bénéfique, neutre ou néfaste), de la thyroïde, du poumon, de la vessie et de la prostate (pour lesquels l’effet est soit bénéfique soit neutre), de la peau (l’effet serait neutre ou néfaste) mais aussi sur le cancer du sein (l’effet serait néfaste ou neutre pour les cancers hormono-dépendants alors que d’autres publications indiquent un effet néfaste voire bénéfique pour les cancers du sein non-hormono-dépendants).
Haut degré de civilisation
Quant aux maladies neuro-dégénératives, il existe un consensus indiquant que la consommation modérée de vin aurait un effet bénéfique dans leur prévention. Un niveau de piste sérieuse indique également un effet bénéfique en ce qui concerne l’amélioration des fonctions cognitives.
Si la science est revenue pour des erreurs de méthodologie sur le fameux « French paradox » qui, dans les années 1990, pointait pour les Français un risque statistique de maladie cardio-vasculaire 3,5 fois inférieur aux Américains grâce à leur consommation modérée de un à trois verres de vin rouge par jour, riche en antioxydants en dépit d’une consommation équivalente de graisses saturées, il existe néanmoins aujourd’hui un niveau de pistes sérieuses indiquant des effets bénéfiques sur la mortalité totale d’une consommation raisonnée de vin.
En revanche, il y a un consensus médical absolu pour la santé prénatale qui préconise l’abstinence totale pour les femmes enceinte, aucune donnée scientifique ne permettant aujourd’hui de déterminer un seuil de toxicité pour le fœtus.
Malgré les titres quelque peu racoleurs comme « Le vin rouge c’est bon pour le cœur » ou « La maladie d’Alzheimer et les bienfaits du vin », il faut raison garder et s’en tenir aux protocoles expérimentaux et à leurs conclusions. En aucun cas le vin ne doit être considéré comme un élixir de jouvence ou une panacée, ce que les scientifiques cherchent à mettre en évidence ce sont les effets bénéfiques ou néfastes de telle molécule ou association de molécules sur la prévalence de certaines maladies. Il ne s’agit pas de meursault, de saint-estèphe ou d’un blanc de blancs grand cru, mais de polyphénols, d’éthanol, d’acide hydoxycinnamique, d’aldéhyde phénolique, de flavonoïde, de resvératrol, d’effet antioxydant ou anti-inflammatoire… Et si le vin présente des concentrations intéressantes de ces substances, il n’est pas le seul, nombre de fruits ou de légumes en recèlent dans des quantités équivalentes.
On sait d’une manière générale qu’une alimentation variée et équilibrée, limitée en matières grasses et riches en fibres, avec une consommation raisonnable de boissons alcoolisées sont des éléments primordiaux dans la prévention de certaines maladies. Le diabète de type 2 et l’obésité constitueraient des risques possibles de la maladie d’Alzheimer, pouvant être réduits grâce à une activité physique et un régime de type méditerranéen composé de fruits, légumes, poisson, huile d’olive et d’un peu de vin. Ces aliments fournissent des vitamines, des polyphénols et des acides gras insaturés qui réduisent le stress oxydatif et les syndromes inflammatoires par une production plus faible de cytokines pro-inflammatoires.
L’intérêt de ces recherches tient avant tout dans une meilleure connaissance des mécanismes de régulation du corps humain pour imaginer de nouveaux protocoles de soins.
Mais ce que la science ne peut pas prendre en compte dans ce type d’étude, c’est le plaisir de partager un verre ou une flûte, d’accomplir par là même un rituel social, un échange convivial dans le cadre d’une consommation maîtrisée, signe d’un haut degré de civilisation.
Un plaisir qui est sans nul doute excellent pour la santé.

Le champagne bon pour le cerveau ?

Régulièrement publiée depuis 2013 sur la toile, une étude britannique des universités de Reading et d’East Anglia affirmerait que la consommation de trois verres de champagne par semaine améliorerait la mémoire et préviendrait des syndromes de démence et de la maladie d’Alzheimer. Là encore il s’agit d’un raccourci plus que rapide. L’information est devenue tellement virale sur le web que la National Health Service, l’agence de santé britannique a dû publier une mise au point sur le sujet. L’étude portait sur les effets possibles des acides phénoliques trouvés dans le champagne sur la mémoire spatiale du rat. Les chercheurs ont isolé trois groupes de rats qui ont reçu chacun pendant six semaines des doses de champagne, d’alcool et de boisson sans alcool. Il s’agissait d’évaluer avant et après ce régime leur performance à mémoriser des trajets dans un labyrinthe. Au final le "groupe champagne" a obtenu un résultat légèrement supérieur au groupe témoin sans alcool et à l’autopsie, leur hippocampe cérébral révélait des niveaux accrus de diverses protéines liées à la division des cellules et à la neuroplasticité. Selon les chercheurs il semble que "les phénoliques plus petits tels que l'acide gallique, l'acide protocatéchique, le tyrosol, l'acide caftarique et l'acide caféique, en plus des flavonoïdes, peuvent améliorer la mémoire spatiale". Mais l’agence précise qu’il s’agit d’une étude sur "un petit nombre de rats et les améliorations apparentes dans le groupe champagne étaient seulement significatives par rapport au groupe sans alcool (il n'y avait pas de différence significative par rapport au groupe alcool non-champagne.) Cela signifie qu'il n'y a pas de preuve formelle que ces effets résultent directement des composés phénoliques présents dans le champagne" et que l’expérience n’est pas en l’état transposable au genre humain. Et l’agence de conclure avec humour qu’il existe des "alternatives beaucoup moins chères au champagne, comme le persil, les cacahuètes et les bleuets" pour augmenter son apport en acides phénoliques.    

De la modération

Selon les organisations médicales internationales, on entend par consommation modérée l’absorption de : - 2 verres maximum par jour pour les femmes ; - 3 verres maximum par jour pour les hommes ; - 4 verres maximum en une seule occasion ; - 1 jour d’abstinence par semaine.

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