Rilly-la-Montagne est un premier cru de Champagne, faisant partie de la région Grande Montagne de Reims qui est le prolongement oriental du plateau de Brie. Ses 312 ha de vignobles sont situés à 11 km au sud-est de Reims, sur l’escarpement septentrional de la Montagne, section de la Côte de l’Ile-de-France.
Véritables témoins de la présence historique du vignoble rillois, les 2680 parcelles de vignes s’étendent sur 70 lieux-dits le long d’un versant de 2,5 km, avec une altitude comprise entre 110 m aux Hautes Blanches Voies, en contrebas du Mont Thibé vers le fort de Montbré, et 192 m à l’ouest du cru, ou plus bas à 170 m à l’est. Cette différence d’altitude ouest-est est favorable car elle oriente les lignes de source vers le bas de versant et elle donne des expositions vers l’est et le sud-est. Le vignoble est étendu en croupes qui réalisent la jointure avec le bas de versant. De ce fait, Rilly ne présente que peu d’expositions vers le nord et le nord-ouest. De plus, le cru est entouré à l’ouest et au nord par différents avant-buttes et monticules qui sont autant de protection ou inversement de barrage aux masses d’air froides ou chaudes.
La majorité du sous-sol rillois est constituée par la craie blanche du Campanien, remaniée par endroit avec des sables à galets de silex, et surtout par des colluvions de pente et des colluvions de fond de vallée qui développent des sols bruns calcaires plus ou moins profonds, et que l’on retrouve sous le village et à l’est du cru.
Carrefour géologique
Rilly-la-Montagne constitue un carrefour géologique. A l’ouest du cru, l’escarpement devient entièrement réalisé dans les formations tertiaires, alors qu’à l’est, la craie affleure à la base du talus. A Rilly, vers 150 m d’altitude le versant montre une première inflexion, un replat structural réalisé par 10 mètres de marnes brun-clair laguno-lacustres du Thanétien supérieur, riche en débris de coquilles. Ces marnes forment des replats dans le vignoble, principalement à l’ouest aux lieux-dits Hausse Cuisses et Mont des Grues. Ces marnes disparaissent vers Chigny-les-Roses, alors qu’à l’ouest de Rilly les dépôts sableux sont encore d’origine marine. Rilly marque ainsi la limite orientale de la transgression marine du Thanétien et de manière plus étendue de toutes les transgressions du Paléogène (66 à 23 millions d’années).
Ensuite, le vignoble atteint les formations de l’Yprésien inférieur composées par une série de 20 mètres de marnes, argiles et sables. Une couche imperméable a cédé au lieu-dit Vauzillons en 1986, occasionnant un glissement de terrain avec des bombements de vignes. Le versant se poursuit avec une seconde inflexion de versant vers 220 m d’altitude au niveau des sables de l’Yprésien supérieur. On poursuit avec les marnes vertes du Lutétien, puis par des bancs calcaires et marneux du Bartonien. La corniche sommitale boisée est assurée par la pierre meulière caverneuse du Rupélien, très fragmentée par le gel, et enrobée ou surmontée par des argiles qui expliquent l’imperméabilité du plateau.
La typicité des champagnes de Rilly-la-Montagne traduit le mix climat-géologie interprétés par les vignerons rillois : une fraîcheur crayeuse nuancée par des notes charnues argileuses, évoluant vers la rondeur et la gourmandise. Le cépage majoritaire est le pinot noir (40 %) qui exprime une typicité variétale sur la craie et le climat rillois : framboise, cerise, cassis, poivre noir, mûre, prune ou prunelle, pamplemousse rose. Il offre des vins élancés, pulpeux, frais et salins. Les terrains plus riches le dotent d’arômes plus capiteux et épicés : myrtille, figue, pain grillé, abricot, pâte d’amande, amande douce, biscuit, épices douces. Les vins se montrent charpentés, plein de sève, avec des accents humifères et un enrobage gourmand. Le cépage meunier (35 %) offre à la fois sa fraîcheur sur les terrains sableux et calcaires (orange, orange sanguine, fleur d’oranger, ananas, kumquat), et des notes plus charnues sur les terrains plus argileux (pêche, compote de coing, gingembre, pomme tatin).
Le chardonnay (25 %) n’est pas en reste, exprimant également cette dualité avec, d’une part, ses notes fraîches d’agrumes, de citron, bergamote, fleurs d’acacia, verveine, d’autre part ses notes plus charnues de poire, jasmin, fenouil, bouton d’or, framboise, pêche blanche, nougat.
Cette complémentarité naturelle explique, en partie, que les gammes de champagnes proposées oscillent entre les trois cépages. La période estivale se prête au style frais et charnu des champagnes rillois. Apéritif aux légumes de saison, salades bien composées, poissons grillés, fromages frais, sans oublier quelques cuvées de pinot noir et de cuvées travaillées sous bois qui réveilleront les viandes blanches et rouges grillées. Bacchus, l’emblème du village, nous tend la flûte dans un esprit ginguette où le champagne sait côtoyer les couchers de soleil estivaux. Voilà l’été !