En juillet 2024, la Commission européenne avait annoncé la création d’un Groupe de haut niveau sur la politique viticole, constitué de représentants des États membres, du Parlement européen et des organisations professionnelles européennes. Pour la France, c’est un représentant du ministère de l’Agriculture qui siège dans ce forum, dont l’objectif est de formuler des recommandations stratégiques pour l’avenir de la filière confrontée aux différents défis : déclin de la consommation intérieure, changement dans les préférences des consommateurs, contexte international instable et conditions de production et de récolte de plus en plus imprévisibles en raison du changement climatique.
Les travaux du GHN ont débuté en septembre 2024, sollicitant les analyses des acteurs de la filière vitivinicole comme la Fédération européenne des vins d’origine (Efow) composée notamment de la Cnaoc et représentée par le président du SGV Maxime Toubart. Après quatre réunions, les experts du GHN ont présenté leurs recommandations le 16 décembre, en présence de Christophe Hansen, le commissaire européen à l’agriculture et l’alimentation, et des représentants de la filière.
Trois thématiques clés identifiées
Aligner la production de vin sur la demande
Les experts du GHN soulignent la nécessité de soutenir financièrement la compétitivité, la durabilité et la résilience du secteur. Ils proposent une boîte à outils flexible et adaptée pour gérer le potentiel de production de vin en respectant le principe de subsidiarité. Parmi les recommandations figurent des programmes d’arrachage ciblés pour réduire durablement le potentiel de production dans les régions confrontées à des surstocks, assortis de critères environnementaux et sociaux. Les experts préconisent une extension de la durée de validité des autorisations de replantation à huit ans permettant une meilleure planification et une transition alignée sur les besoins du marché et les objectifs écologiques.
Le GHN recommande de permettre aux États membres de ne plus attribuer de nouvelles autorisations de plantation, mettant ainsi fin à l’obligation en vigueur depuis 2016 d’accorder un minimum de nouvelles plantations. Cette proposition, aujourd’hui largement consensuelle en raison de la crise économique touchant de nombreuses régions viticoles, vise à harmoniser les politiques de gestion du potentiel viticole. La coexistence d’outils de réduction du potentiel de production, comme l’arrachage ou la distillation, avec l’obligation d’accroître les superficies viticoles, semble incohérente. Cette obligation a par ailleurs conduit à des situations inadaptées, notamment en Champagne, où des plantations de vins sans Indication géographique (VSIG) ont été autorisées, en contradiction avec les choix stratégiques du vignoble. La levée de cette obligation permettrait une gestion plus cohérente et respectueuse des dynamiques locales et des besoins du marché.
Par ailleurs, selon les recommandations du GHN, la vendange en vert doit être renforcée comme outil conjoncturel pour limiter les excédents ponctuels, tout en favorisant une gestion proactive par les États membres. Ces mesures offriraient une réponse ajustée aux spécificités locales et une adaptation progressive de la production viticole à la demande, tout en maintenant l’équilibre économique et environnemental des territoires viticoles.
Renforcer la résilience aux défis du marché et du climat
Le Groupe recommande à la Commission de maintenir une stratégie d’exportation ambitieuse de l’UE pour élargir l’accès au marché, éliminer les barrières commerciales et protéger les produits vitivinicoles contre les pratiques commerciales déloyales.
Sur le volet climatique, les experts souhaitent un renforcement des outils d’assurance pour pallier les mauvaises récoltes avec des aides des États membres, notamment sur le calcul des pertes pour les régimes de compensation climatique.
En ce qui concerne le budget de la Politique agricole commune (PAC) pour le secteur vitivinicole, le Groupe recommande de donner de la flexibilité à la gestion financière et de modifier les programmes nationaux de soutien dédiés au vin pour permettre une réaction plus rapide aux événements de marché ou climatiques.
Il insiste également sur la nécessité de rendre les derniers résultats de la recherche sur l’adaptation au changement climatique facilement accessibles à la communauté agricole, et d’étendre la liste des investissements éligibles au titre des interventions dans le secteur vitivinicole afin d’y inclure les dernières technologies pertinentes.
S’adapter aux tendances pour saisir de nouvelles opportunités de marché
Enfin, le Groupe souligne la nécessité de faciliter l’adaptation du secteur aux préférences changeantes des consommateurs et aux tendances du marché mondial en améliorant la collecte de données, en facilitant les techniques et la promotion de produits de la vigne adaptés aux nouveaux goûts et aux nouvelles demandes, y compris les vins désalcoolisés, et en soutenant l’innovation. Il souligne également les opportunités pour le secteur de promouvoir les vins de l’UE en tant que messagers de la durabilité, de la protection du paysage, du développement rural et de la culture, l’importance de faciliter les ventes directes des producteurs aux consommateurs et la nécessité de favoriser l’œnotourisme.