Assemblée générale du SGV : rassemblés par les valeurs, portés par une dynamique

Temps fort pour les acteurs du vignoble et leurs partenaires, l’assemblée générale du SGV a rempli les gradins du Millésium d’Épernay jeudi 24 avril. L’occasion de présenter les sujets d’actualité pour la filière champagne, notamment concernant l’organisation des sections locales, l’évolution de la flavescence dorée, et l’emploi de main-d’œuvre.

Temps de lecture : 5 minutes

Auteur : Guillaume Perrin

Comme le veut la tradition, c’est le secrétaire général du SGV Damien Champy qui a donné le rythme de l’assemblée générale du 24 avril, en compagnie du président Maxime Toubart, de la directrice générale Estelle Thibaut, avec l’appui des élus du conseil d’administration et de plusieurs collaborateurs du Syndicat.

L’année écoulée a été riche en actualités, tant pour la filière qu’à l’échelle mondiale, ce qui a enrichi le programme d’autant de sujets à relater. Les sujets de préoccupation du monde vigneron tels que la campagne viticole, le fonctionnement de l’ODG, et la commercialisation ont été mis en lumière, tout comme la politique et l’économie, dont le SGV reste un rouage essentiel à plusieurs niveaux. 

L’actualité champenoise, c’est aussi le dixième anniversaire de l’inscription Unesco : au travers de plus de 45 événements, les Champenois ont l’occasion de souffler cette bougie symbolique tout au long de l’année, et le point d’orgue sera la grande célébration du 4 juillet à Champillon. Rendez-vous dès 18 heures pour une nuit de célébrations, ponctuée par un spectacle son et lumière inédit au cœur des vignes. 

 

Bienvenue aux « unions » locales

En amont de l’assemblée générale traditionnelle, une évolution des statuts a été proposée au vote, visant à conférer davantage d’autonomie aux sections locales. Emmanuel Mannoury, rapporteur de la commission vie syndicale, souligne que « c’est un sujet qui nous occupe pleinement depuis un an. »

Par la transformation des sections en « unions locales », « notre premier enjeu est celui de la sécurisation », appuie l’élu. « Pour cela, il faut permettre aux sections locales de se mettre en conformité avec la législation », par exemple dans les relations avec les banques et les assurances.

« En se dotant de statuts qui leur confèrent la personnalité juridique, elles pourront exercer leur activité sans risque. Le deuxième enjeu est celui de nous adapter aux besoins des sections d’être plus autonomes dans leur fonctionnement, leurs projets, mais évidemment en conservant un lien politique fort avec le syndicat. »

Si, concrètement, les unions locales vont se doter de « statuts de syndicats » – assortis d’un règlement intérieur, ce qui leur conférera une personnalité morale et leur permettra de mener à bien leurs projets locaux avec davantage d’autonomie –, il n’y aura « pas de changement dans le quotidien », assure Emmanuel Mannoury. Ni la taille de ces unions, ni le nombre de délégués et leur désignation ne changeront, tout comme leur lien avec le SGV.

 

Flavescence dorée : poursuivre l’effort collectif

Le SGV ne compte pas relâcher la pression en matière de flavescence dorée. Pour David Gaudinat, élu référent du SGV sur ce sujet, «nous devons absolument nous mobiliser pour organiser la lutte, comme nos aïeux se sont mobilisés pour lutter avec succès contre le phylloxéra. »

Anaëlle Comestaz, chargée d’étude ODG, rappelle quant à elle que les solutions collectives « commencent par la détection massive et rapide des pieds contaminés. »

En 2024, 12 200 ha ont été surveillés de façon collective, dont 8 200 ha de façon volontaire. Cette campagne de prospection représente 206 demi-journées de surveillance, pour une couverture partielle de 262 communes. Cela a notamment permis de prendre conscience qu’en l’espace d’un an, le variant M54, le plus épidémique pour ce qui est de la flavescence dorée, s’est propagé de 9 à 23 communes.

Malheureusement, ce volume reste insuffisant, car « 39 communes de notre AOC restent des zones blanches. Au vu de la progression du variant le plus épidémique, le M54, on ne peut pas se permettre de laisser une parcelle plus de deux ans sans surveillance », recommande David Gaudinat. D’autant que « si un pied passe à la trappe, c’est dix fois plus l’année suivante, 100 fois plus l’année d’après et en quatre ans, si rien n’est fait, ce sont des centaines d’hectares qui risquent de disparaître. »

Autant de motifs qui expliquent pourquoi, en 2025, les prospections collectives deviennent obligatoires pour l’ensemble des communes de l’AOC.

Les communes contaminées, qui entrent en zone délimitée sous autorité préfectorale, requièrent des mesures de lutte poussées : surveillance de l’ensemble des surfaces chaque année, arrachage systématique de tous les pieds marqués « jaunisse » et traitement insecticide. « Ces mesures nous permettent de limiter l’expansion, mais notre volonté, c’est que cette situation ne se reproduise pas ailleurs », précise David Gaudinat.

Il n’existe pas de solution alternative à la prospection collective, souligne-t-il également : « En l’état, seul l’œil humain, pour peu qu’il soit bien formé, est efficace pour ce travail. » Et pour que chacun soit bien formé afin d’identifier correctement les symptômes causés par la flavescence dorée, le SGV met à disposition de ses adhérents des supports pour faciliter le diagnostic.

En partenariat avec le Comité Champagne et les Chambres d’agriculture, des modules de formation en ligne vont aussi être mis en place cette année.

 

Toujours « Ensemble pour les vendanges en Champagne »

Le SGV, en lien avec de nombreux acteurs professionnels et organismes institutionnels, a longuement travaillé sur plusieurs sujets relatifs à l’emploi de main-d’œuvre au vignoble : la santé et la sécurité des travailleurs, la sécurisation de la prestation de services, l’hébergement collectif et le recrutement.

Ces sujets ont été identifiés comme prioritaires dès la fin des vendanges 2023, rappelle Ophélie Lapie-Lamiable, administratrice du SGV.

La vendange 2024 a été marquée par des partenariats plus nombreux et renforcés, ce qui a par exemple permis d’éditer des guides et fiches pratiques en plusieurs langues, de former plus de 500 personnes aux gestes qui sauvent, ou encore de créer des conditions de recrutement plus attractives pour les étudiants, les candidats locaux, ou les bénéficiaires du RSA.

Le SGV met un accent particulier sur les relations avec des vignerons avec leurs prestataires : « Le recours à la prestation de services, ce n’est pas déléguer sa vendange sans se soucier de rien », insiste Ophélie Lapie-Lamiable.

La création d’une section viticole au sein du Syndicat des Entrepreneurs du Territoire « favorise le dialogue avec la filière » grâce à cette nouvelle représentation, et permet d’harmoniser les messages de prévention et de vigilance.

Si les prestataires sont de plus en plus largement référencés dans la plateforme Vitiargos, outil de sécurisation des relations entre donneurs d’ordre et prestataires créé par la filière champagne, les vignerons peuvent également y évaluer leurs pratiques, afin que le plus grand nombre d’acteurs de la vendange puissent tendre vers les standards sociaux définis par la filière.

Les relations avec les services de l’État ont également joué un rôle majeur dans la sécurisation de la vendange 2024 grâce à la création d’une cellule de veille quotidienne, qui a permis d’obtenir « des remontées d’information du terrain au jour le jour pour détecter les situations à risque et réagir le plus vite possible en cas de difficulté ».

« Un nombre très important d’agents de contrôle ont été mobilisés, notamment dans la Marne. Cela a permis de réagir dans les plus brefs délais dès qu’une situation était susceptible de nuire à la sécurité des vendangeurs », note Ophélie Lapie-Lamiable.

Quatre procédures de fermetures administratives ont été entreprises cette année, « c’est évidemment quatre de trop, mais la multiplication des contrôles a permis de détecter ces cas et d’y mettre fin rapidement », relève l’administratrice du SGV.

Et la vendange 2025 se prépare dès maintenant, avec la poursuite du plan Ensemble pour les vendanges en Champagne. Dès à présent, les actions individuelles sont fortement encouragées par le SGV.

Formation des exploitants et des salariés aux gestes qui sauvent, préparation d’offres d’emploi destinées à l’université ou aux grandes écoles, réhabilitation d’un vendangeoir, autodiagnostic sur VitiArgos… Les pistes d’amélioration sont légion.

Paroles de présidents

Vincent Jourdan, président de la section Champagne de La Coopération Agricole Grand Est :

« La coopération s’est construite dans une période de difficultés, puis elle est devenue une véritable force économique du vignoble en développant ses propres marques au service de nous tous. Elle doit le rester, elle doit se renforcer et poursuivre sans relâche les investissements nécessaires à la notoriété de ses marques.

Nous devons accroitre les 9 % de parts de marchés des marques collectives, dont la moitié est réalisée à l’export, tout en permettant à nos coopérateurs de bénéficier de cuvées toujours plus adaptées à leurs besoins. Nous devons mettre nos compétences au service de la désirabilité du champagne. Les périodes incertaines renforcent chaque fois la puissance du collectif, lequel est la meilleure réponse aux difficultés engendrées par la conjoncture.

Ce collectif fait naturellement partie de l’ADN de la coopération. Notre modèle coopératif, très contemporain, est définitivement intemporel. Il est une réponse aux évolutions sociétales, très adapté à l’évolution du vignoble et aux activités de plus en plus diversifiées. N’oublions pas que le projet coopératif s’est construit également au service du syndicalisme. Il est devenu rapidement un projet structurant pour le vignoble par le regroupement de l’offre en amont, et la diversité des débouchés vers l’aval.

Quand il faut peser dans les négociations interprofessionnelles, quand il faut structurer les relations contractuelles, ou porter une ambition économique partagée, la coopération prend et continuera à prendre sa part de responsabilité. Je vous disais il y a un an que la coopération allait faire mieux en alignant plus encore ses engagements sur les échéances du contrat interprofessionnel. Nous l’avons fait. Ce sont désormais 77 % des contrats de la coopération qui sont strictement alignés sur ces échéances. Un indicateur de la force du collectif au service du vignoble entier. Nous pourrons être écoutés si nous sommes unis. Notre capacité à organiser et structurer notre filière sera notre force. »

 

David Chatillon, président de l’Union des Maisons de Champagne :

« Au 31 juillet prochain, nous allons flirter avec le seuil inédit de 1,3 milliard d’équivalent bouteilles hors réserve. Un niveau très difficilement supportable pour les entreprises de notre filière, d’autant moins supportables que les taux d’intérêt ont été multipliés par trois ou quatre en quelques années.

Nous savons d’expérience que les crises se déroulent très souvent de la même manière en Champagne. Quels sont les risques encourus du fait de cette situation ? Pour les metteurs en marché, le risque, c’est la dépréciation de leur stock qui, je vous le rappelle, sert de garantie auprès des banques, et en dernière extrémité, c’est le risque de faillite. Pour les producteurs de raisin, le risque, c’est que tous les raisins ne trouvent pas preneur et que le prix du raisin chute brutalement suivi par le foncier.

Une fois qu’on a dit cela, que peut-on faire pour préserver la valeur ? Pour cela, il nous faut agir très vite, c’est-à-dire avant l’effondrement du prix des bouteilles, puis de celui du raisin. Pour rappel, en 20 ans, la Champagne a pratiquement doublé la valeur créée, passant de 3,2 à 6 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Cette valeur, elle a été très équitablement répartie entre les metteurs en marché et les producteurs de raisin. C’est une expression des vertus du modèle champenois. Nous y sommes parvenus en pilotant nos stocks pour les mettre en adéquation avec nos expéditions futures.

Cette année, il nous faudra d’une manière ou d’une autre réduire le surstock et envoyer un message fort et clair que notre navire est bien piloté. Il faudra concilier deux exigences antagonistes : préserver un certain niveau de chiffre d’affaires par hectare pour vos exploitations et réduire le surstock. En clair, ça veut dire rentrer moins d’équivalents bouteilles à la vendange 2025 que nous n’aurons expédié de bouteilles. C’est notre unique chance de traverser cette tempête sans casse. En ayant le courage de prendre collectivement la bonne décision, nous nous créerons les meilleures chances d’un avenir prospère, sachant que nous conservons évidemment d’immenses atouts. »

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