Aux Riceys, la guerre des coops n’a pas eu lieu 

D’un côté les « Gauchos », de l’autre les « Cathos » ! Aujourd’hui centenaires, la Cave Coopérative des Riceys et la Coopérative de Balnot-sur-Laignes ont longtemps coexisté avec la Coopérative Viticole des Riceys, apparue en 1953 sur fond d’obédiences politiques et convictions religieuses divergentes de la première.

Temps de lecture : 4 minutes

Auteur : Philippe Schilde

D’un côté les « Gauchos », de l’autre les « Cathos » ! Aujourd’hui centenaires, la Cave Coopérative des Riceys et la Coopérative de Balnot-sur-Laignes ont longtemps coexisté avec la Coopérative Viticole des Riceys, apparue en 1953 sur fond d’obédiences politiques et convictions religieuses divergentes de la première.

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Serge Wolikow, historien : « On surjouait un peu les différences à une époque… »

L’épisode à la « Peppone-Don Camillo » des Riceys n’est pas un cas unique en Champagne. À une époque, des villages ont abrité deux coopératives en raison de convictions politiques et religieuses distinctes. Celles des uns ne correspondaient pas à celles des autres et l’on préférait l’entre soi. On ne se chamaillait pas forcément, heureusement, mais on affichait sa différence, en l’occurrence des divergences d’opinions. « On surjouait un peu ces différences. Et cela se jouait davantage sur le plan politique que dans un contexte économique. Ce jeu d’influence n’avait rien d’une guéguerre territoriale, à mon sens. Personne ne voulant la peau de l’autre », estime avec le recul Serge Wolikow, auteur dernièrement d’un pensum consacré à la Côte des Bar dans toutes ses dimensions. L’historien avait été invité à présenter le 10 juin aux Riceys une conférence sur un sujet qu’il maîtrise parfaitement, à savoir l’émergence et l’évolution de la coopération dans la région et plus particulièrement dans le vignoble aubois. Il a rappelé au passage qu’en 1922, le syndicalisme viticole local, encore imprégné par les luttes menées durant la Révolte de 1911, conduite par Gaston Cheq, était très lié au Parti communiste. Et, plus tard, peu après la Libération (en 1947), ce même engagement syndical a permis aux vignerons du secteur de voir… rouge, puisqu’il a soutenu le classement en appellation AOC du Rosé des Riceys. Un vin tranquille d’une couleur vermillon intense que produit dans les règles de l’art, entre autres, la Cave Coopérative des Riceys… 

Marquis de Pomereuil, du nom du pire seigneur du village…

Quand les membres de la Cave coopérative ont décidé de commercialiser leurs propres bouteilles, il a fallu trouver un nom plus vendeur que celui de « Cave Coop… » à imprimer sur l’étiquette. Pas vraiment sexy, de l’avis de Christian Jojot, prompt à narrer une histoire un tantinet croquignolesque, puisque les héritiers d’une entreprise fondée par des gens de gauche – disons-le franchement – ont fait appel à un… aristocrate dans l’espoir de donner un maximum de prestige à leurs flacons.  

« C’était dans les années 1970, et l’idée a d’abord été émise de baptiser notre champagne Marquis de Pomereu, en référence à un certain Jean-Baptiste de Pomereu, marquis des Riceys. Ce seigneur ayant vécu — et sévi ! — ici au XVIIIe siècle avait pourtant compté parmi les pires emmerdeurs que la population ricetonne a connus sous l’Ancien Régime. Un comble ! », s’esclaffe l’ex-président du conseil d’administration de l’Union Auboise.  

Las, pour les hérauts de cette pompeuse marque Marquis de Pomereu, leur choix a été très rapidement contesté par une grande maison champenoise, Pommery, qui y voyait une fâcheuse proximité avec son propre nom. « Il fallait surmonter cet écueil et finalement les coopérateurs ont opté pour Marquis de Pomereuil, un nom qui sonne mieux tout compte fait, et totalement incognito celui-là. Depuis, la marque a gagné ses lettres de noblesse sur la scène champenoise et elle est toujours bien présente aujourd’hui », se réjouit Christian Jojot, visiblement guère tiraillé entre les origines modestes d’une coop née dans une vinée il y a 101 ans et le joli patronyme à particule qu’elle véhicule.

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