Quand, fin 2024, en grande pompe, il sera procédé à l’inauguration de la restauration de Notre-Dame de Paris, le champagne devrait couler à flots dans la capitale où le joyau gothique aura retrouvé toute sa splendeur.
Le divin breuvage devrait également être débouché pour l’occasion dans une commune viticole discrète de la Côte des Bar : Bragelogne-Beauvoir. L’une des plus importantes entreprises de la localité, la Scierie de Beauvoir, dirigée par la famille Georget, aura en effet contribué au retour de la célèbre flèche de l’édifice parisien, depuis peu hissée sur le faîte par des charpentiers volants.
C’est à cette société auboise que l’on a confié le soin de tailler les énormes grumes de chêne spécialement sélectionnées et débitées en forêt du Nivernais afin de guider dorénavant tous les regards vers le ciel francilien. Qu’à la demande de l’Établissement Public chargé de la conservation et de la restauration Notre-Dame, le savoir-faire local en la matière ait pu s’exprimer et s’inscrire dans une nouvelle aventure millénaire, rend fier le maire de Bragelogne-Beauvoir et ses administrés.
Hervé Griffon et son premier adjoint Denis Coqueret, qui n’est autre que le président de la section locale du SGV, louent volontiers les talents qui composent une entreprise fortement employeuse de main-d’œuvre, et qu’ils décrivent « en plein essor ».
Certes, ils aimeraient bien que des moyens techniques et financiers soient également mobilisés par l’État pour la poursuite de la rénovation de l’église de Bragelogne (Saint-Pierre-aux-Liens) dont il ne reste plus que le chœur (datant du XIIe siècle) flanqué d’une tourelle. « Le reste de l’édifice a été détruit durant la dernière guerre », observent-ils, en rappelant que l’église de Beauvoir est pour sa part demeurée entière et qu’il convient d’entretenir « avec équité » le patrimoine des deux communes fusionnées en 1973. Les élus y tiennent, quels que soient les dossiers traités, d’ailleurs.
« Sur le plan économique, outre la scierie, nous avons ici un silo du groupe Vivescia et de nombreuses structures viticoles. L’agriculture et la vigne font bon ménage, et constituent de solides ancrages. Nous disposons aussi de tout un maillage d’entreprises artisanales, actives notamment dans les travaux publics et la construction », détaillent Hervé Griffon et Denis Coqueret en notant que des diversifications et créations d’activités plus ou moins récentes (lire en encadré) ont permis d’accroître la notoriété d’une commune qui se verrait bien monter en flèche sur le plan viticole et œnotouristique.
Elle a des atouts pour cela et multiplie les initiatives, en lien notamment avec les communes d’Avirey-Lingey, de Channes et de Bagneux-la-Fosse réunies dans un entreprenant comité de Saint-Vincent de la Vallée de la Sarce, « la vallée la plus méridionale de l’AOC Champagne ».
« Depuis la Route du Champagne 2017 organisée avec Cap’C, nous mutualisons des moyens et allons de l’avant, ensemble. C’est visible notamment à travers la toute nouvelle signalétique commune mise en place. Elle flèche les multiples acteurs du vignoble champenois, les sites communaux et de patrimoine. Bientôt, nous compterons deux points de vue panoramiques bien identifiés et aménagés, l’un sur Beauvoir, l’autre sur Bragelogne », confient-ils, encouragés à dévoiler la diversité et la beauté des paysages par l’OT de la Côte des Bar et le SGV.
La Sarce réaménagée, fil rouge d’un environnement naturel préservé
Parmi les projets structurants pour l’avenir de ce secteur rural où se perpétuent certaines traditions dans un cadre intergénérationnel (par exemple autour de l’alambic fixe communal, des repas de chasse, des activités de l’Authentique, association de mise en valeur des richesses naturelles, historiques et culturelles locales…) figure le réaménagement de la Sarce.
À commencer par la restauration de la zone humide qui prend naissance à la source même de cet affluent de la Seine. « Pilotés par l’Agence de l’eau, les travaux ont démarré à proximité de l’un de nos deux lavoirs. Il s’agit, en éliminant divers obstacles, tels les vannages, de retrouver une continuité écologique et de réintroduire de la biodiversité naturelle tout au long de cette rivière. On nous fait la promesse que les truites vont revenir ! », confient les élus, lesquels vont signer une convention avec le Conservatoire des espaces naturels afin de prendre la mesure dans le temps de ces évolutions.
Elles seront positives sur le plan environnemental, mais également sur le plan touristique et ludique.
« Nous souhaitons que les visiteurs puissent mettre à profit ces lieux et que toute la vallée de la Sarce bénéficie d’un nouvel élan touristique et œnotouristique. Bragelogne-Beauvoir dispose de son propre gîte communal, des initiatives fleurissent dans le secteur, il faut enclencher un mouvement durable », exposent-ils.
Certes, la commune, qui comptait 295 hectares de vignes avant la crise du phylloxéra en recense moins de la moitié aujourd’hui, mais on caresse ici l’espoir qu’avec la révision de l’aire géographique de l’Appellation les lignes puissent bouger un jour. Rappelant volontiers le compliment souvent formulé à l’adresse des Doubets-Tallibautiers par quelques collègues ricetons (« Vous cultivez vos vignes comme des jardins ! »), Denis Coqueret espère que sa commune sera servie. Et le président de la section locale du SGV d’envisager déjà un passage en vignes semi-larges sur de futures parcelles supplémentaires. En attendant, disposant à la fois de l’AOC Champagne, mais aussi de l’AOP Chaource via l’élevage de laitières du Gaec de Serge Coqueret, la commune peut d’ores et déjà faire valoir une destination effervescente et gourmande.