Entre réalisme sobre et révolte pacifique
Dans Celles-sur-Ource, le promeneur ne peut pas manquer les reproductions en grand format de cartes postales anciennes qui montrent certains lieux du village couleur sépia. Le passé et le présent figurés au même endroit.
Encore plus impressionnante et plus saisissante est la fresque qui, depuis 2016, orne un mur dans la rue principale. Elle mesure 10 m de long pour 4 m de haut et représente une scène de vendange à une époque où le cheval et les grands paniers en osier étaient de la partie, avec toute la compagnie des Tassin de 1935. Ils sont figés ici dans ce rituel pour l’éternité…
Peinte à la bombe en niveaux de gris et positionnée sur le pignon d’une vaste serre (pour jeunes plants, bâtie par le grand-père), propriété de sa famille, elle en jette par son réalisme sobre et affectueux.
Les anciens de la commune, qui ont reconnu des proches sur cette toile à ciel ouvert, ont exprimé leur émotion auprès d’une artiste attachée à ses racines. Cyrielle Tassin, adepte du graffiti urbain, estimait qu’un village rural pouvait lui aussi arborer ce type d’œuvre que l’on retrouve plus généralement au cœur de grandes villes branchées.
Il y a quelques années, lors des Chevalets d’Essoyes, elle a aussi laissé sa trace dans ce village cher à Renoir. Plus récemment, avec la même touche sensible, l’artiste champenoise a illustré Bleu Horizon, un recueil de poésie signé de Patrick Biloé (en hommage aux Poilus), avec lequel elle a aussi collaboré pour Pas si bêtes ces animaux. Son coup de crayon étant en parfaite harmonie avec l’imaginaire de l’auteur, un troisième ouvrage du duo est en préparation.
Diplômée des Arts appliqués à Chaumont (en 2009), Cyrielle a enchaîné avec l’école supérieure d’Art de Metz, où elle a pu diversifier ses pratiques artistiques et notamment s’adresser à l’urbanisme. Le Diplôme national d’Art plastique (DNAP) a couronné ce parcours (en 2013) avant l’obtention du Diplôme national supérieur d’expression plastique (DNSEP), Master 2 (en 2015). « J’ai pu mettre à profit aussi le programme Erasmus en Espagne, à Castellon de la Plana, qui m’a ouvert la voie sur un travail plus engagé en recourant à toutes les formes d’expression dans les arts contemporains : sculpture, gravure, dessin, photo, vidéo… »
Sans oublier des installations qui lui permettent de « voir les choses en grand ». On retiendra, pour rester dans le domaine viticole qui la berce depuis l’enfance, l’édification d’un château fort uniquement composé de caisses de vendanges, sorte de Lego géant. Ou encore cet Observatoire futuriste qui surmonte une armée de bouteilles (de champagne) bien ordonnées qui ont toutes un drapeau blanc sortant du col. Comme un message de paix contenu dans ce qu’elle décrit comme des « cocktails Molotov ».
Sa manière d’être une artiste détonante parfois, aussi.