Une année se termine à peine qu’une nouvelle campagne culturale se profile déjà. « Hâtez-vous lentement, et sans perdre courage, vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage », écrivait Nicolas Boileau, l’homme de Lettres contemporain de Dom Pérignon.
Nous sommes les héritiers d’un cycle ancestral. Comme à chaque début d’année et comme nos aïeuls avant nous le faisaient, nous allons préparer nos vignes à produire le meilleur mais sans avoir la moindre idée de ce que réserve la météo à nos raisins ni les marchés à nos vins.
Nos métiers demandent de la passion, de la confiance et une bonne dose de résilience.
Personne n’a la prétention de vouloir s’affranchir des aléas météorologiques ou des crises économiques, et les deux dernières années nous l’ont bien rappelé. Mais notre chance, et il faut bien en avoir conscience, est d’appartenir à une appellation qui a su se structurer autour de valeurs collectives fortes et protectrices.
Par un système original d’autogestion au sein de l’interprofession, nous avons construit des outils de régulation qui nous permettent de traverser la plupart des difficultés sans casse majeure.
Nous maîtrisons les plantations pour protéger notre vignoble, nous maîtrisons les rendements pour garantir nos revenus et grâce à la réserve individuelle, nous avons notre assurance récolte enviée par toutes les autres appellations.
Votre Syndicat met en œuvre toute son influence pour préserver ces acquis historiques, et la tâche n’est pas facile face à ces surenchères de règlements et d’interdictions qui sont bien loin des réalités du terrain.
Cette influence et cette force de négociation tiennent dans la cohésion de tous les professionnels du vignoble autour des valeurs qui portent nos métiers. Et cela durera tant que nous parlerons d’une seule voix pour l’intérêt de tous. Je vous rappelle que vous avez un lieu pour vous exprimer, pour débattre et faire progresser notre vignoble : c’est votre section locale. Y investir un peu de temps, c’est montrer à tous notre détermination à préserver notre culture et nos intérêts.
Difficile après une année aussi catastrophique dans les vignes d’aborder l’incontournable volet de l’environnement. Pourtant, nous avons raison de maintenir le cap pour optimiser les intrants, nous avons raison de vous accompagner vers la certification et on peut être fiers d’annoncer que désormais, plus de 54 % des surfaces affichent des pratiques plus respectueuses de l’environnement.
Face à ces attaques inédites de mildiou et d’oïdium, la facilité serait de remettre en question notre engagement environnemental. Mais bien au contraire, il faut garder nos objectifs et poursuivre cette démarche fondamentale pour notre avenir.
L’année passée doit nous interroger sur nos pratiques et nous inciter à être collectivement inventifs.
Il faut perfectionner nos outils d’aide à la décision et se former pour mieux les utiliser. Il faut moderniser notre matériel pour traiter efficacement tout en réduisant les doses. Il faut adapter notre vignoble à l’évolution du climat.
Le monde nous regarde et l’exigence des consommateurs ne fera que croître.
L’avenir est entre nos mains ; c’est à nous de déterminer la qualité du vignoble que nous léguerons à nos enfants.
Je vous souhaite une très belle année. Que la vigne soit saine et que le champagne soit bon.
Plus simplement, je nous souhaite d’être heureux.