Filière Champagne : Réduction, séquestration, compensation… Atténuation ?

Ces vingt dernières années, le Comité Champagne s’est donné les moyens d’entraîner les professionnels champenois dans une démarche de réduction de leur empreinte carbone. Pierre Naviaux, responsable du service Développement durable de l’interprofession, retrace le chemin parcouru.

Temps de lecture : 3 minutes

Auteur : Guillaume Perrin

  Le premier bilan carbone (lire encadré) de la Champagne, réalisé en 2003, est sans nul doute le point de départ de la longue démarche carbone de la filière dont le bilan sera établi en 2050. Il y a vingt ans, il s’agissait alors de « prendre conscience de la double contrainte énergie-climat : les impacts du…

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À quoi sert le bilan carbone ?

Cet outil de diagnostic conçu par l’Ademe (Agence de la transition écologique) permet de calculer l’empreinte carbone générée par un individu, une organisation ou un territoire. Attention, le bilan carbone n’a pas pour vocation de culpabiliser ses utilisateurs ou de chercher un bouc émissaire. « C’est un diagnostic de vulnérabilité au carbone, nuance Pierre Naviaux. Pas question de dire qu’il ne faut plus se déplacer en voiture ou faire de l’œnotourisme, par exemple. Si nous nous retrouvons en situation de pénurie ou si un évènement vient faire obstacle à une dépendance, on a un pan entier de notre activité qui peut tomber… ». En un mot, « ce diagnostic sert à se demander comment on peut se décarboner pour être plus résilient », résume Pierre Naviaux.

Bien établir ses priorités

Grâce au bilan carbone, la Champagne a pu affiner la connaissance des secteurs où elle présente des fragilités environnementales.

Aujourd’hui, le cœur de métier de la Champagne (vigne et vin) représente moins de 15 % des émissions de ses GES. L’occasion de lutter contre quelques idées reçues : « Contrairement à ce que l’on peut imaginer, la consommation de carburant pour la traction à la parcelle n’est pas le principal poste d’émissions de GES ; elle ne représente que 6 % de l’empreinte de la filière », souligne Pierre Naviaux. Mais l’électrification croissante des machines, à condition que l’électricité utilisée soit de source décarbonée, est une voie d’avenir déjà bien engagée. Moins visible, la fertilisation génère quant à elle du N2O, au pouvoir de réchauffement très élevé : 1 kg de protoxyde d’azote émis dans l’atmosphère équivaut à 272 kg de CO2.

Concernant le vin, la consommation énergétique des bâtiments et l’usage de gaz frigorigènes dans les groupes de production de froid (climatisation, régulation de température en cuverie) sont les deux postes majeurs qui pèsent sur le bilan champenois. Un guide de l’écoconception aidera les établissements vinicoles à tendre vers la sobriété.

Le pouvoir d’attraction suscité par le roi des vins est peut-être son talon d’Achille environnemental : le poste « transports » (œnotourisme, professionnels, fret amont, interne et aval) compte pour 30 % du total des GES, majoritairement à cause du recours aux avions et aux voitures. Des solutions de fret par cargos voiliers sont étudiées pour le marché nord-américain, et le fret aérien a « quasiment disparu ».

Les intrants, dans le cadre du bilan carbone, englobent non seulement les phytos, mais aussi la production de consommables… et de services ! Par le jeu des ratios monétaires, tous types de prestations sont ainsi susceptibles d’entrer en ligne de compte. « C’est quelque chose de sous-estimé : tout ce que l’on génère comme activité peut avoir une empreinte carbone », avertit Pierre Naviaux.

Pas de surprise concernant l’emballage : l’écrasante majorité de son empreinte provient de la bouteille en verre, du fait de la consommation de gaz nécessaire à sa production. « On a vu l’an dernier à quel point il fallait être vigilant sur cette vulnérabilité », glisse Pierre Naviaux en référence à l’explosion des coûts de l’énergie répercutés par les verriers et autres industriels.

Quant aux immobilisations, poste important, mais amorti sur la durée de vie du bâtiment, « la Champagne a la chance d’être une filière avec de gros bâtiments historiques ».

Enfin, la distillation pèse lourd dans le traitement des déchets et sous-produits. Un constat paradoxal : « C’est plutôt contrintuitif, reconnaît Pierre Naviaux. En comparant la distillation, la méthanisation, le compostage et l’épandage des marcs, on s’est rendu compte que les deux premières étaient les filières les plus vertueuses du point de vue environnemental. La distillation permet de produire de la matière première par recyclage de nos sous-produits, pour d’autres activités : carburant, cosmétiques, alimentation animale, engrais… C’est une sorte d’investissement environnemental, un moindre mal : on dépense de l’énergie pour en récupérer par la suite. »

« Il n’y a pas une victoire facile qui nous permette d’effondrer le bilan carbone de la filière. Cela passe par une multitude de petits gestes dans tous les secteurs, et que chacun procède aux actions qui sont à sa portée », conclut le spécialiste du développement durable.

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